mardi 25 juin 2013

Le Musée de la Cour d'Or à Metz

En fait, c'est plutôt DES Musées de la Cour d'or qu'il faudrait parler, car plusieurs collections y sont exposées, celles d'archéologie, dont il sera question dans ce billet, celle d'art médiéval, Ainsi qu'un espace dédié aux arts contemporains. Les espaces eux-mêmes faisant partie du patrimoine architectural et historique lorrain.
  Sculptures médiévales dans l'espace du Grenier de Chèvremont, un des anciens greniers à blé de la Ville.  © Créafrance
Le Musée tire son nom du palais des rois mérovingiens d'Austrasie qui devait se trouver sur le site actuel de l'établissement, sur ou à côté des anciens thermes romains de l'ancienne Divodurum Mediomatricorum, capitale de la Cité des Médiomatriques.
Une partie des collections gallo-romaines occupe le site des thermes de Divodurum, découverts lors de la réfection des bâtiments et conservés in situ. 
Photo © musee.metzmetropole.fr
La ville gallo-romaine était un des plus grandes des Gaules avec peut-être 15 à 20'000 habitants, ce qui est tout à fait considérable pour l'époque. Elle occupa tout d'abord l'emplacement de l'ancien oppidum, la place forte et capitale des Médiomatriques au temps de l'indépendance, puis s'étendit rapidement vers le Sud selon les plans orthogonaux classiques des villes romaines.
De cette époque gallo-romaine il subsiste les très importantes et très riches collections actuellement exposées dans le Musée Archéologique. Enrichies par les découvertes faites dans les environs, l'ensemble en fait à mon avis une des plus belles collections de France, admirablement mise en valeur dans ces cryptes qui sont souvent les restes des thermes de l'époque. Une mise en lumière astucieuse ajoute encore au charme sombre et envoûtant de ces lieux.
C'était à l'occasion des Journées Nationales de l'Archéologie, organisées par l'INRAP, que j'officiais dans ce vénérable établissement, à faire des démonstrations de tournage, en compagnie d'Armand et Sandrine Desbat qui réalisaient des cuissons en four gallo-romain. Mais pour une fois, plutôt que d'évoquer mes prestations lors de ces journées, j'ai préférer évoquer le cadre dans lequel elles se sont déroulées.

Le but de ce billet étant évidemment de vous parler de quelques aspects des céramiques exposées en ces lieux, je ne saurais passer sous silence les exceptionnels ensemble lapidaires exposés.Le choix est vaste, très vaste, mais je ne saurais passer sous silence les deux ensembles tout à fait grandioses que sont le Mithraeum de Sarrebourg et la Colonne de Merten

L'autel du Mithraeum de Sarrebourg. Le culte initiatique à Mithra, divinité indo-orientale "importé" par les soldats orientaux et devenu populaire aux IIème et IIIèmes siècles se pratiquait dans des grottes, comme à Sarrebourg, mais le plus souvent dans de petits sanctuaires souterrains de forme étroite et allongée. Le relief montre la scène classique du combat de Mithra contre le Taureau. Photo © Wikimedia Creative Commons
Jupiter à l'Anguipède. Groupe typique du panthéon gallo-romain, il représente un cavalier divin piétinant un géant à queue de serpent. La plupart du temps ces figures étaient placées au sommet d'importantes colonnes. Le chapiteau montre encore les allégories des quatre saisons entre des feuilles d'acanthe. Cette colonne de Merten devait mesurer à peu près 13 mètres de hauteur.
Outre l'impressionnant lapidaire évoqué, on peut y voir ue impressionnante collection de stèles funéraires et de reliefs de toutes sortes.Par ailleurs les aspects de la vie quotidienne sont illustrés par de très nombreux objets domestiques ou  éléments de parure. De nombreuses pièces complètes de céramique sont bien sûr exposées à la Cour d'Or.
Petit florilège:

Coupe en sigillée de forme "Dragendorff 29 b" de Gaule du Sud. Bel exemple issu de la période de splendeur des ateliers de la Graufesenque. Une réalisation moulée de grande classe. Milieu du Ier siècle de notre ère.
Photo © Wikimedia Creative Commons
Les productions locales sont aussi à l'honneur, comme le témoignent ces sigillées de Chémery:
Sortie des réserves du Musée, un coupe Dragendorff  37 à décor floral des ateliers de Chémery.



Extrait d'un bordereau d'enfournement. Ces textes établissaient les décomptes nominatifs des pièces produites par chacun des potiers ou ateliers dont les pièces étaient ensuite cuites dans le four communautaire. Malheureusement ce texte, très incomplet ne permet pas une reconstitution de la fournée...








La "Terra Rubra" est une production typiquement gallo-belge. C'est une sorte d'imitation de sigillée au revêtement rouge mat. Les ateliers locaux ont littéralement inondé la Gaule belgique du premier siècle de notre ère des ces productions. Mais qui dit imitation de sigillée ne signifie pas céramique de piètre qualité. La Terra Rubra est presque toujours de facture très soignée. Ce plat de presque 40 cm. de diamètre en est un bel exemple.


La "terra nigra", littéralement "terre noire"  est la variante sombre de ces productions gallo-belges, et suit donc les mêmes courant commerciaux. Bien que de taille plus réduite que le plat, cette assiette n'en est pas moins de fort belle exécution.
 L'esprit créatif des potiers gallo-romains s'exprime surtout dans l'exécution des vases à boire, champ ouvert à toutes sortes de créations très originales, bien que restant souvent accordée aux courants esthétiques d'une région ou d'une province. Il se trouve toutefois des formes ou des types commune à des entités géographiques ou territoriales beaucoup plus vastes, comme les gobelets à dépressions ou également dits "à haut col":
Trois gobelets à haut col. l'un lisse, le second à côtes de melon et le troisième à dépressions- Cette forme et commune à toutes les Gaules du Nord des Alpes et du Massif central. Nombreux sont les ateliers à les avoir fabriqués, et sans les examiner de près, il est difficile de déterminer leur provenance (fin IIème-début IIIème siècle)
Autres variations sur les gobelets à dépressions...
Par leur forme et le style de leur décor typiques de la Gaule de l'Est, des deux exemplaires proviennent probablement des ateliers de la vallée de l'Argonne. Ces pièces ne sont pas moulées, mais décorée à la barbotine à main levée.



Une autre pièce argonnaise, qui permet une fois de plus de témoigner de la très grande maîtrise des décorateurs.










Bien que la plupart du temps les gobelets soient de teinte sombre, on trouve quelques exemplaires clairs issus des ateliers de sigillée. Les ateliers  de Rheinzabern ont réalisé de très belles productions selon cette technique. Comme les pièces sombres, le décor est réalisé à main levés à la barbotine.
Ce n'est pas une facétie de potier! Les vases à visage sont relativement courants dans toutes les régions. A ses cotée un gobelet des ateliers de Trèves. Très techniques à réaliser correctement des pièces sont décorées à la barbotine blanche sur un revêtement gris à noir métallescent. En une seule cuisson...

Je ne vous dévoilerai pas la suite...Ce serait vous faire rater cette visite lors d'un prochain passage à Metz.
Et si vous n'y passez pas, faites le détour! Ce magnifique musée, trop méconnu, en vaut largement la peine!

Sinon, rendez-vous au printemps 2014. Je devais à nouveau y présenter la fabrication des céramiques avec Armand Desbat lors des journées de l'Archéologie


Plus de renseignements sur le site des Musées de la Cour d'Or:

http://musee.metzmetropole.fr/site/index.php


mercredi 12 juin 2013

Céramiques gauloises du Pas de Calais, approche des techniques de fabrication

Comme je vous l'avais promis dans le récent article "Asnapio 2013, quatre jours en Gaule", voici le premier article sur les techniques de façonnage des céramiques gauloise du Pas de Calais.
Préambule: 
Ce projet est parti d'une rencontre avec David Bardel, céramologue INRAP pour le Pas de Calais, ceci lors de mon passage à Asnapio en 2012. A cette occasion, nous avions longuement examiné ces pièces de facture tout à fait curieuses et décidé, dès que l'occasion s'en présenterait, de tenter de restituer les techniques selon lesquelles elles avaient été montées et assemblées en partant d'une analyse des traces montrant les diverses opérations techniques qui pouvaient encore être visibles.
Ces récipients montraient à l'examen visuel toute une série d'indices qui nous faisaient pressentir une méthode de montage tout à fait déroutante, allant résolument à l'encontre de tout ce qu'un céramiste moderne peut envisager.
Premièrement, l'intérieur des récipients, que ce soient des formes ouvertes, bols ou coupes, mais aussi des pièces fermées comme des vases ou ds bouteilles, montre systématiquement des tracs de modelage et de polissage à main levée. Par contre l'extérieur paraît toujours tourné, mais aussi poli, voire lustré sur le tour.
Secondement, ces pièces ayant subi les injures du temps et surtout la pression de la terre dans laquelle elles ont été enfouies, montrent très souvent des lignes de rupture régulières, suggérant un assemblage en plusieurs éléments plutôt qu'une confection à partie d'une balle unique d'argile. Certains pieds annulaires semblent aussi avoir été rapportés après coup alors que la pièce avait été entièrement assemblée et modelée.
C'est donc sur la pertinence de ces méthodes de montage que nous avons travaillé, d'une part afin de juger de la faisabilité, mais aussi d'autre part aussi d'en comprendre l'intérêt du point de vie de l'organisation du travail et de la productivité d'un atelier appliquant ces méthodes de travail.
Il convient encore de préciser que si la provenance de ces céramiques est assurément issue de fabrications locales ou régionale, aucun atelier de production n'a à ce jour été découvert.
Les modèles archéologiques: 
Nous disposions pour ce travail d'un bon nombre de pièces complètes ou partiellement conservées issues de sépultures allant de la période de la Tène C1 (env. 250 à 80 av. J.-C.). Toutes avaient été préalablement remontées dans les laboratoires de l'INRAP.
Une des jattes LTC2 ou D1 que nous avons tenté de reproduire.
La même, vue de dessous. Son profil apparaît parfaitement tourné et lissé. On y remarque aussi de sérieux coups de flamme provoqués par la cuisson.
Détail de l'intérieur montrant les traces de raclage et de polissage à main levée. Et toujours la ligne principale de rupture au niveau de la carène.
La plupart des pièces examinées montraient comme l'exemple qui précède les mêmes traces de travail, tournage externe, et traces de modelage et polissage à main levée à l'interne. Les lignes de rupture, par contre, pouvaient varier d'une pièce à l'autre. Sur ce précédent exemple, une seule ligne paraît évidente, située juste au-dessous du diamètre maximal.
Lignes de rupture sur un bol LTC1-C2
Sur d'autres exemplaires, spécialement ceux dont la panse est plus haute, d'autres lignes peuvent apparaître. La pièce ici à gauche semble avoir été assemblée à partie de trois éléments. Deux lignes de rupture évidentes sont bien visibles, l'une au-dessus de la carène, et l'autre au-dessous de la lèvre, suggérant que cette dernière a été posée après l'assemblage du fond et de la panse. Un autre de ces bols, à peine visible en arrière-plan montre exactement la même ligne de cassure sous la lèvre. En fait c'est pratiquement sur l'ensemble de ce lot de céramiques qu'apparaissent ces types de cassures. Afin de donner une direction à notre travail, nous avons posé l'hypothèse que ces cassures pouvaient être révélatrices d'une faiblesse issue de la jonction de deux "coupons" d'argile.
En céramique moderne, l'assemblage des céramiques modelées se fait la plupart du temps selon la technique des colombins. Ce sont de petits boudins d'argiles que l'on empile et pétrit ou colle par lissage sur la partie préalablement montée. paradoxalement, cette méthode de faire n'est pratiquement jamais usitée dans les sociétés qui pratiquent toujours la céramique modelée, spécialement en Afrique, mais également en Inde. Si occasionnellement la technique des colombins est pratiquée, c'est presque toujours en association avec d'autres méthodes, martelage sur formes concaves ou convexes, moulages partiels ou montage de plaques. De plus, et surtout si il s'agit de gros récipients, les colombins peuvent devenir énormes, atteindre la grosseur de l'avant-bras, et ainsi un seul d'entre aux pourra représenter 10 à 15 cm. de hauteur de panse en plus.
Sur ces pièces gauloisess du Pas-de-Calais, on se heurte d'ailleurs à une difficulté technique particulière aux fonds arrondis des pièces ouvertes et évasées. Monter de tels fonds à partir de colombins représente une réelle difficulté si ce n'est pas une impossibilité. C'est une forme très instable, et rapidement lors du montage elle a tendance à s'écraser, s'effondrer sur elle-même. Certes, on peut toujours la reprendre par martelage, mais la perte de temps est importante et le procédé très peu pratique. D'ailleurs l'absence de lignes de rupture claires sur les fonds de ces jattes nous a fait d'emblée choisir une voie différente.
C'est ainsi par moulage que nous avons décidé de confectionner ces fonds. De petits paniers en osier, roseau ou paille peuvent être très pratiques pour réaliser cette opération qui ne prend qu'une ou deux minutes. Il suffit de plaquer une feuille d'argile à l'intérieur de ces derniers, et attendre qu'elle se raffermisse suffisamment pour l'extraire. Cette opération peut également être réalisée dans une forme en argile crue ou cuite, dans un récipient en bois ou encore dans une simple cupule aménagée dans le sol d'un atelier ou d'une maison. Il suffit de prendre ce que l'on a sous la main et qui est le plus pratique...

La panier reste toutefois une option intéressante, Si l'argile est très molle, on peut l'y laisser se raffermir quelques heures avant l'extraction. Ainsi si une certaine quantité de vanneries sont nécessaires, on pourra facilement les ranger quelque part un fois l'opèération terminée, ou alors recommencer immédiatement une série de pièces. Dès le démoulage, l'élément est encore mis en attente afin qu'il se raffermisse suffisamment pour être assemblé avec d'autres coupons. On ne se soucie pas des éventuelles traces laissées par la structure du panier, les manipulations ultérieures les effaceront totalement.



Entre-temps, on peut préparer une bandelette de terre qui formera la panse. Un long boudin d'argile aplati avec le tranchant de la main fera l'affaire.









Dès qu'il est suffisamment raffermi, le fond est martelé sur une forme creuse afin de lui donner sa forme définitive, mais aussi pour tasser l'argile qui a été parfois fortement étirée lors de sa mise en forme dans le panier. On peut aussi réaliser cette opération sur une table ou une planche, mais c'est un peu plus délicat. Le petit outil que l'on voit à gauche, une enclume ou une masselotte en terre cuite est d'origine népalaise. C'est typiquement le genre d'instrument utilisé par les potiers de ce pays lors de ce genre d'opérations de martelage.


On peut alors "coller" la bandelette qui formera la panse. Cette opération se fait ici à sec. mais certaines terres demandent tout de même à être préalablement humectées sur les surfaces à coller afin d'assurer un meilleure jonction.

















Toujours maintenue dans sa forme creuse, l'ébauche commence à être formée par pression des doigts afin d'approcher sa forme définitive. la pression exercée lors de cette mise en forme contribue à bien coller ensemble les coupons d'argile.









 En procédant par pincement et par passages successifs, on parvient rapidement à former les ébauches des cannelures de la panse et ainsi à approcher la forme définitive de la jatte. Un mouvement bien régulier et organisé facilite grandement cette tâche qui ne prend que quelques minutes. Nous avons choisi de poser la pièce sur une tournette qui facilite la régularité. Sachant qu'au final cette jatte devra être corrigée par tournage externe, cela ne nous a pas paru incongru de procéder ainsi.
Ensuite, on procède à une première rectification de l'intérieur du récipient. Ce travail se fait à main levée, au moyen d'une plaquette de bois, mais pas en rotation. En travaillant au soleil, la pièce sèche assez rapidement, et donc rétrécit et devient instable dans sa forme creuse. Nous avons essayé de procéder par tournage, et ça ne marche pas. La jatte se décentre immédiatement et l'opération devient impossible. Caler le récipient avec de petites pastilles de terre entraîne des déformations indésirables et ne convient pas non plus. Par contre, dès que le récipient est suffisamment ferme, on peut travailler directement sur les genoux.
La jatte étant maintenant devenue assez ferme, on la retourne et la pose sur un tour à main. Un petit disque de centrage en bois ou en terre cuite permet une pression assez forte et régulière sur son fond, ce qui empêchera l'ébauche de déraper ou de se décentrer sous l'effet de la pression de l'outil. C'est ce tournassage externe, qui donnera son aspect définitif à cette jatte. On a utilisé ici des plaquettes d'ardoise ou de bois. L'ardoise, plus mordante permet le dégrossissage.
Comme elle s'affûte très facilement, on peut l'apprêter en angles assez vifs qui permettront de laisser la réserve pour les cordons.
 Si les stries laissées par le travail à l'ardoise sont importantes, on peut repasser une fois un outil en bois. Contrairement à ce que l'on peut imaginer, certaines argiles se tournassent facilement au moyen d'outils réalisés dans des matières tendres. Cette méthode est plus douce. Les marques ou stries laissées sont moins importantes, mais dépendent toutefois grandement du type d'affûtage.
.Dès que l'extérieur est ainsi entièrement retaillé, le tout est poli au galet. En plein soleil, il faut faire vite, la pièce séchant très rapidement. Mais il n'est pas interdit de travailler à l'ombre...
Dernier polissage interne au galet, où l'on retrouve les traces laissée sur les pièces archéologiques.
La jatte à peu près terminée. Il ne subsiste qu'une légère ondulation sur la lèvre qu'il sera facile de corriger.
Le nombre d'opérations nécessaires au façonnage d'une telle jatte peut paraître élevé. Mais toutes sont assez, voire très rapidement réalisées. Au final, une technique qui paraissait peu pertinente se révèle être tout à fait intéressante et réaliste, et même expéditive, car il est bien possible qu'une telle méthode ne soit qu'à peine moins rapide que si la pièce était entièrement tournée!
Lors des journées de formation destinées aux étudiants de Lille 3, aux guides du parc Asnapio et a quelques amateurs issus du grand public, en reprenant ces méthodes, nous avons pu évaluer le degré de faisabilité de ce genre de techniques de façonnage, et tenter de comprendre comment pouvait s'organiser un atelier gaulois dans le cadre d'une telle production. Ce ne sont que quelques éléments, et de plus appréhendés du point de vue d'une organisation moderne d'un cycle de travail, mais qui permettent toutefois d'entrevoir comment peut s'organiser une telle chaîne de fabrication.
  • Le moulage des fonds, comme la confection des bandelettes ne nécessite pas de formation particulière.
  • Le martelage des fonds est également une opération facile, mais demande un certaine attention pour obtenir une forme régulière.
  • L'assemblage des différents éléments peut être réalisable après seulement quelques heures d'expérience.
  • L'ébauche des cannelures de la panse demande un peu d'expérience, mais une personne habile y parviendra progressivement au bout de quelques dizaines d'heures d'apprentissage.
  • La rectification et le polissage à main levés des surfaces interne est également assez facile, et sera accessible après quelques jours d'apprentissage.
  • Seules les dernières opérations de rectification de la panse sur le tour à main demandent une formation technique assez poussée, sans toutefois nécessiter l'acquisition complète du métier de tourneur.
L'apparition et le développement du "vrai" tournage chez les Gaulois semblent lié au degré d'urbanisation et à l'organisation sociétale qui en découle. Seuls les groupes sociaux relativement importants parviennent à créer une division du travail permettant une spécialisation importante de certains artisans. Or le tournage de la céramique est justement un de ces artisanats demandant une formation très poussée.
Les peuplements celtes, en ce qui concerne les périodes de la Tène moyenne ou récente pour la région Nord - Pas de Calais sont essentiellement ruraux, aucune bourgade importante ou ville n'y sont connus. Par ce type de production céramique, on a donc probablement un stade intermédiaire entre techniques domestiques de modelage et atelier spécialisé pratiquant le tournage. On peut imaginer un ou deux artisans maîtrisant quelque peu la technique du tour à main s'entourer d'un groupe d'auxiliaires, femmes, hommes ou même enfants, qui réaliseront toutes les opérations techniques accessibles après une formation sommaire. Un groupe de "potiers-paysans" ou "potiers éleveurs" fonctionnant selon ce schéma peut être tout à fait envisageable, qu'ils soient de condition libre ou rattachés d'une manière ou d'une autre à un groupe ou à une famille aristocratique.
Espérons que dans l'avenir un des ateliers produisant ce type de céramiques soit découvert et puisse faire l'objet d'une fouille extensive, il y aurait beaucoup à apprendre d'un telle investigation.
Et peut- être un article à réécrire...
Car c'est aussi ça, l'archéologie expérimentale. Tout peut être remis en question par une découverte et ce qui semble correct aujourd'hui ne le sera peut-être plus demain...

Je reviendrai encore une fois  prochainement sur ces expérimentations. Mais cette fois ce sera sur une pièce nettement plus "technique"...